Giorgia Meloni persiste et signe : elle confirme la double stratégie qu’elle avait mise en place durant sa campagne électorale victorieuse. D’un côté, rassurer Bruxelles et les marchés et de l’autre, conforter l’électorat traditionnel de l’extrême droite.
Italie
Alors que nos sociétés semblent basculer «à droite», les différentes forces politiques peinent à développer une nouvelle offre idéologique, solide et cohérente.
Cette fois la victoire de l’extrême droite et de la droite entre de plain-pied dans la réalité quotidienne des Italiens. La désignation du gouvernement Meloni, ce 22 octobre, donne la mesure du bouleversement culturel et politique que constitue cette première dans un pays dont la constitution est basée sur l’antifascisme
Berlusconi : « J’ai un peu renoué le contact avec le président Poutine, un peu beaucoup, dans le sens où pour mon anniversaire, Poutine m’a envoyé vingt bouteilles de vodka et une très gentille lettre. J’ai répondu en lui envoyant des bouteilles de Lambrusco et une très gentille lettre. Il m’a dit que j’étais le premier de ses cinq vrais amis »
Ignazio La Russa, élu, jeudi, à la tête du Sénat. Ce vieux routard de la politique italienne, déjà vice-président de la chambre haute sous la législature précédente, est le cofondateur de Fratelli d’Italia avec Giorgia Meloni. Son élection à la tête du Sénat a été un moment choc plus que symbolique
Nous devons empêcher Viktor Orbán d’exporter son « autocratie informationnelle » dans d’autres pays d’Europe comme l’Italie. Mais pour cela, il faut en comprendre les ressorts, explique Peter Kreko, l’un des organisateurs du Forum de Budapest.
La formation du gouvernement indiquera déjà la part de l’héritage fasciste que Meloni compte imposer. Tous les observateurs s’accordent à penser que si sur le plan économique, elle restera dans la ligne libérale tracée par Draghi. Par contre, sur le plan sociétal (“Dieu, Famille, Patrie”) pour les droits de femmes, des immigrés, des lgbt, notamment, les risques sont grands.
Tout se passe comme prévu. Les élections générales attestent d’un glissement vers la droite. Les prévisions des sondages sont vérifiées par le vote, notamment dans les résultats des coalitions. La gauche désunie perd, le Mouvement 5 étoiles avec sa plateforme sociale récupère des voix (15 %), la coalition de centre-droit obtient la majorité absolue dans les deux chambres et gouvernera.
Pour la première fois depuis cent ans, l’Italie s’apprête à expérimenter un gouvernement dominé par l’extrême droite. Une menace pour l’Europe, après les succès des Démocrates de Suède et du RN aux élections législatives.
« Giorga Meloni défend une vision très conservatrice, avec pour valeurs centrales ‘Dieu, la famille et la patrie : « Je suis Giorgia, je suis une femme, je suis une mère, je suis italienne, je suis chrétienne », résumait-elle en 2019, lors d’un rassemblement à Rome.
Le fascisme n’a sans doute jamais vraiment quitté l’horizon politique italien. Dès 1946, des dignitaires de la République de Salo[4] ont créé le MSI (Mouvement Social Italien) d’où est issue Meloni. À la fin du XXe siècle, un courant historique révisionniste a mis sur le même pied fascistes et antifascistes considérés désormais comme des combattants également honorables de la guerre civile (1943-1945). Et en 1994, Berlusconi avait intégré des ministres du MSI dans son gouvernement. La banalisation était déjà en cours.
Les trois partis de la coalition droite-extrême droite en Italie sont divisés sur la guerre en Ukraine et les relations avec la Russie. Giorgia Meloni, la possible première ministre, est atlantiste quand ses alliés sont pro-Poutine. Si les électeurs italiens donnent bien la victoire dimanche à un parti héritier du fascisme, ce sera un électrochoc politique majeur, et pas seulement pour l’Italie.