Bachar el-Assad, malgré l’étendue de ses crimes, a-t-il cessé d’être un paria sur la scène internationale ? C’est au moins en partie le cas depuis que la Ligue Arabe, réunie au niveau ministériel le 7 mai au Caire, a décidé de réintégrer la Syrie dans l’organisation. Le président syrien pourra assister au sommet de la Ligue prévu le 19 mai à Ryad. La Syrie en avait été exclue en 2011 (par 18 voix sur 22). La décision de la Ligue arabe devrait constituer pour les Européens et les Américains une occasion non pas d’abandonner leurs positions mais de retrouver sur l’affaire syrienne une volonté d’agir qui leur faisait largement défaut ces dernières années.
Iran
Le 15 avril dernier, de nouvelles mesures de répression ont été mises en place, causant la fermeture de plus de 150 commerces. Parallèlement, la peine capitale est de plus en plus utilisée par le régime. Si le contexte social iranien alerte, sa politique étrangère semble être en plein repositionnement stratégique : rapprochement avec la Russie mais surtout réconciliation diplomatique avec l’Arabie saoudite.. L’analyse de
Thierry Coville, chercheur à l’IRIS.
Les exécutions judiciaires en Iran ont enregistré une hausse de 75% en 2022, avec 582 pendaisons, selon deux organisations de défense des droits humains qui dénoncent une « machine à tuer » visant à « instiller la peur » dans le pays.
Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à être pris de court. Cette reprise des relations diplomatiques arrive en effet au pire moment pour le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, déjà fragilisé dans son pays par la contestation que suscite une réforme de la justice qui mine les ressorts démocratiques d’Israël. M. Nétanyahou espérait isoler un peu plus l’Iran en ralliant l’Arabie saoudite, ses calculs viennent de s’effondrer.
L’annonce et la signature de cet accord, le jour même de la réélection de Xi Jin Ping à un troisième mandat à la présidence de la Chine, ne sont pas fortuites. Elles viennent signifier au monde que Pékin est désormais le seul interlocuteur capable de dicter à l’Iran sa conduite future. Il a aussi l’avantage de séduire l’égo de l’Arabie saoudite, en quête de statut de puissance régionale détachée des contraintes imposées par l’Occident.
Les Américains ont-ils véritablement l’intention d’accorder un blanc-seing à Israël et de lancer une confrontation d’envergure avec l’Iran ? Soutenir aveuglément l’État hébreu dans ses choix politiques et stratégiques entache la crédibilité de Washington – qui conteste l’annexion russe de la Crimée, mais tolère la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens – et lui fait aussi courir le risque d’entraîner les États-Unis dans une troisième crise géopolitique qu’ils n’ont ni l’envie, ni les moyens d’assumer.
Le Centre pour les droits humains en Iran a lancé une pétition, signée par près de 40 groupes de défense des droits humains, et adressée à la présidence actuelle de l’UE, la Suède, exhortant les États membres à convoquer les ambassadeurs iraniens dans leur pays lors de la Journée internationale des femmes le 8 mars, pour leur dire « de cesser d’emprisonner et de perpétrer de la violence à l’égard des femmes qui réclament leurs droits et libertés fondamentales en Iran » et de « mettre fin à la violence physique et sexuelle contre les détenues et les manifestantes ».
Israël est pointé du doigt pour l’attaque de drones contre un complexe d’usines d’armement à Ispahan, dans le centre de l’Iran. L’Iran est au cœur de toutes les crises (Ukraine, nucléaire, révolte des femmes…), et le durcissement de son régime annonce les confrontations à venir.
Le régime semble être aux abois et il ne répond à la contestation qu’en durcissant la répression. Jusqu’où ira-t-il ? Car pour le moment, cette répression n’a pas été suffisante pour faire taire les opposants. Si les manifestants se font moins entendre, ils n’ont pas cédé et sont au contraire de plus en plus colère contre les autorités, et le régime se sent toujours menacé.
La Belgique doit-elle tout faire pour libérer Olivier Vandecasteele, condamné en Iran à 40 ans de prison et 74 coups de fouet ? La pression des proches du travailleur humanitaire place l’Etat Belge face à un dilemme majeur: le droit à la vie d’Olivier Vandecasteele face au droit à la vie des victimes du terrorisme. Il y a deux dilemmes dans cette affaire. D’abord, le dilemme entre le respect de deux principes fondateurs. Le respect de l’Etat de droit, et le respect du droit à la vie d’Olivier Vandecastele.
Je pense que sa nature et sa constitution ne permettent aucune réforme. Le guide suprême est désigné par Dieu. Quand Ayatollah Khomeini est arrivé au pouvoir Il avait clairement mis en garde ceux qui voulaient défier son autorité divine. S’opposer à lui était, avait-il affirmé, s’opposer à Dieu Une autorité qui émane de Dieu ne se soumet pas à la volonté du peuple.
Pourquoi de tels événements tragiques mettent en branle de vastes pans des sociétés concernées reste impossible à savoir. Sauf à considérer que, comme dans tout processus de contestation sociale d’ampleur, l’ensemble des contradictions se conjuguent, s’accumulent et se cristallisent à un moment précis dans un puissant mouvement de contestation politique. Tel est le cas dans la République islamique d’Iran en ce moment.