L’Arabie Saoudite s’est placée au centre du jeu diplomatique moyen-oriental, s’alliant selon les cas aux Russes, aux Chinois ou aux Américains. Elle s’est émancipée de la tutelle américaine comme d’autres puissances moyennes, à la faveur de la guerre en Ukraine. Dans le quotidien libanais « L’Orient-le-Jour », qui n’est pas particulièrement proche du pouvoir saoudien, Mohamed Ben Salman, le prince héritier du royaume, est décrit comme un homme « qui est en train de prendre une dimension qu’aucun leader arabe n’a eue depuis Nasser ».
Arabie saoudite
Bachar el-Assad, malgré l’étendue de ses crimes, a-t-il cessé d’être un paria sur la scène internationale ? C’est au moins en partie le cas depuis que la Ligue Arabe, réunie au niveau ministériel le 7 mai au Caire, a décidé de réintégrer la Syrie dans l’organisation. Le président syrien pourra assister au sommet de la Ligue prévu le 19 mai à Ryad. La Syrie en avait été exclue en 2011 (par 18 voix sur 22). La décision de la Ligue arabe devrait constituer pour les Européens et les Américains une occasion non pas d’abandonner leurs positions mais de retrouver sur l’affaire syrienne une volonté d’agir qui leur faisait largement défaut ces dernières années.
La réintégration de la Syrie au sein de la Ligue arabe relève de la décision de régimes qui ont tous conclu qu’elle leur bénéficierait, ou qu’elle représenterait un moindre mal pour leurs intérêts. Elle s’effectue par-dessus les peuples et constitue un brevet d’impunité.
Le 15 avril dernier, de nouvelles mesures de répression ont été mises en place, causant la fermeture de plus de 150 commerces. Parallèlement, la peine capitale est de plus en plus utilisée par le régime. Si le contexte social iranien alerte, sa politique étrangère semble être en plein repositionnement stratégique : rapprochement avec la Russie mais surtout réconciliation diplomatique avec l’Arabie saoudite.. L’analyse de
Thierry Coville, chercheur à l’IRIS.
Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à être pris de court. Cette reprise des relations diplomatiques arrive en effet au pire moment pour le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, déjà fragilisé dans son pays par la contestation que suscite une réforme de la justice qui mine les ressorts démocratiques d’Israël. M. Nétanyahou espérait isoler un peu plus l’Iran en ralliant l’Arabie saoudite, ses calculs viennent de s’effondrer.
L’annonce et la signature de cet accord, le jour même de la réélection de Xi Jin Ping à un troisième mandat à la présidence de la Chine, ne sont pas fortuites. Elles viennent signifier au monde que Pékin est désormais le seul interlocuteur capable de dicter à l’Iran sa conduite future. Il a aussi l’avantage de séduire l’égo de l’Arabie saoudite, en quête de statut de puissance régionale détachée des contraintes imposées par l’Occident.
Dans les pays du Golfe se joue un drame silencieux, celui d’Africains happés par l’illusion d’un avenir meilleur et qui se retrouvent dans un véritable enfer domestique. “The Continent” a enquêté plus précisément sur les employés kényans piégés dans ce système. Mauvais traitements, absence de soins, blessures et assassinats, la liste des sévices est longue.
Alors que la tenue, cet automne, d’une Coupe du monde de football au Qatar confine déjà à l’absurde, la décision d’organiser les Jeux panasiatiques d’hiver de 2029 en Arabie saoudite illustre encore une fois la subordination des enjeux environnementaux aux impératifs de puissance.
En baissant la production de pétrole pour faire remonter les prix, les pays de l’OPEP+ ont infligé un échec à Washington en pleine guerre d’Ukraine et forte inflation. Un signe de l’émancipation de l’Arabie Saoudite, un des alliés historiques des États-Unis.
En infligeant la peine ubuesque de trente-quatre ans de prison à la jeune doctorante en médecine pour avoir défendu les droits humains, les juges justifient les pires clichés dont les autorités saoudiennes sont les premières à se plaindre.
La tentation des Occidentaux est sans doute forte de renouer avec Riyad au nom de l’endiguement de la Russie. Mais où serait alors la cohérence de s’entendre avec un responsable qui, après avoir fait pleuvoir ses bombes sur le Yémen, garde ses bourreaux aussi affairés ?
« Le Yémen est la pire et la plus grande catastrophe humanitaire au monde, et cette catastrophe continue de s’aggraver » a rappelé l’ONU. Selon l’estimation publiée par les Nations unies, 150 000 morts sont dues aux combats, et environ 227 000 aux conséquences indirectes du conflit, comme la famine ou les maladies.