En tête de liste des avantages de l’intelligence artificielle (IA) figure, presque invariablement, l’affirmation selon laquelle ces modèles algorithmiques aideront à lutter d’une manière ou d’une autre contre la crise climatique.C’est ce qu’ont affirmé tour à tour le Forum économique mondial, le think tank américain Council on Foreign Relations ou encore le cabinet de consulting Boston Consulting Group, assurant que l’IA « peut être utilisée pour […] construire une société plus verte ».
Bien qu’énergivores, les intelligences artificielles sont fréquemment brandies comme une solution pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de secteurs polluants, à l’instar de l’aviation et de l’agriculture. Mais pour Naomi Klein, les IA sont loin de « résoudre » la crise climatique ; bien au contraire. « Il est beaucoup plus probable que l’IA soit commercialisée de manière à aggraver activement la crise climatique »
Que ce soit l’industrie fossile, qui a recours à des modèles d’intelligence artificielle pour accélérer l’exploration pétrolière et gazière, ou la firme Coca-Cola, qui investit massivement dans l’IA générative afin de vendre davantage de produits, les entreprises qui se hissent déjà au rang des plus émettrices en termes de gaz à effet de serre exploitent désormais des modèles d’IA pour faire fructifier leurs bénéfices, quitte à alourdir leur bilan carbone. « Il devient de plus en plus évident, énonce Naomi Klein dans les colonnes du Guardian,que cette nouvelle technologie sera utilisée de la même manière que la dernière génération d’outils numériques : ce qui commence par de nobles promesses sur la diffusion de la liberté et de la démocratie finit par un microciblage des publicités pour que nous achetions davantage de produits inutiles et émetteurs de carbone, [comme ceux de Coca-Cola, ndlr] ».
Considérer que les intelligences artificielles permettront de lutter efficacement contre le réchauffement climatique n’est qu’une des multiples « hallucinations » dont souffre le milieu de la tech depuis l’avènement de ChatGPT, avance Naomi Klein. « L’IA générative mettra fin à la pauvreté, nous disent-ils. Elle guérira toutes les maladies. Elle résoudra le problème du changement climatique. Elle rendra nos emplois plus intéressants et plus passionnants. L’IA rendra nos vies pleines de loisirs et de contemplation, nous aidant à retrouver l’humanité que nous avons perdue à cause de la mécanisation capitaliste tardive. Elle mettra fin à la solitude. Elle rendra nos gouvernements rationnels et réactifs, liste la codirectrice du Centre pour la justice climatique à l’université de Colombie-Britannique, dans sa (très) longue tribune. Ce sont là, je le crains, les véritables hallucinations de l’IA et nous les entendons tous en boucle depuis le lancement de ChatGPT ».
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