Limitation des allocations de chômage : où sont les profiteurs ?

Une fois n’est pas coutume, c’est la “nouvelle gauche” flamande – incarnée par Conner Rousseau – qui a remis le sujet sur le tapis. Un projet qui s’inscrit en réalité dans la droite ligne de “l’État social actif”, défendu dès les années 2000 par le mentor de Rousseau, Frank Vandenbroucke. Après deux années de chômage, un bénéficiaire d’allocations devrait accepter un “job de base” sous peine de se voir exclu. Et voilà le débat sur la limitation dans le temps des allocations de chômage relancé, les libéraux (flamands et francophones) et la N-VA se faisant un plaisir de surenchérir sur la proposition “socialiste”.

Rappelons en effet que la Belgique est le dernier pays au monde à garantir un système d’indemnisation du chômage illimité dans le temps. Une “tare” pour la droite, mais que l’on peut tout aussi bien considérer comme une conquête salariale fondamentale dont on devrait être fier. Non seulement parce qu’elle protège les travailleurs individuellement, mais aussi et surtout parce qu’elle est un outil de défense collective extrêmement puissant contre les tentatives patronales de tirer les conditions de travail vers le bas.

Concrètement, un chômage “généreux” permet à ceux qui en bénéficient de ne pas devoir accepter n’importe quel emploi… et à ceux qui en occupent un de ne pas subir la concurrence de chômeurs prêts à tout pour prendre leur place. Au risque d’entretenir “l’assistanat” ? Cette vision de horde de profiteurs désireux de passer leur journée à ne rien faire est déjà absurde (et insultante) en soi. Mais au vu de l’état de la planète, on pourrait de toute façon défendre l’idée que c’est un moindre mal quand on voit le nombre d’emplois aux conséquences écologiques et sociales catastrophiques…

Reste que cette spécificité belge est attaquée de longue date et que de nombreuses brèches ont déjà été introduites dans le principe d’illimitation dans le temps des allocations. Parmi celles-ci, l’introduction du statut de cohabitant dans les années 1980 ou encore le renforcement de la dégressivité par le gouvernement Di Rupo en 2012. La même année, ce même gouvernement limitait également à trois ans le bénéfice des allocations perçues “sur base des études”, ce qui aura notamment pour effet d’exclure du chômage des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux anciens travailleurs à temps partiel qui n’avaient jamais réussi à ouvrir leurs droits “sur base d’un travail”. Car on oublie souvent que si la Belgique se distingue par un système d’indemnisation illimité dans le temps, elle est aussi l’un des pays où l’accès à ce système est le plus contraignant…

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