Alors que l’Etat juif célèbre les 75 ans de son indépendance (proclamée le 14 mai 1948), un tournant historique semble s’amorcer dans l’évolution politique du pays. Après quinze années aux commandes d’Israël, le Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui est revenu au pouvoir le 29 décembre 2022, montre des premiers signes d’affaiblissement.
Durant les trois décennies qu’il a passées dans la vie politique israélienne comme député, ministre et Premier ministre, Benyamin Netanyahou s’est construit une marque solide, plus résistante que celle de David Ben Gourion [fondateur de l’Etat d’Israël et premier chef de gouvernement de son histoire, NDLR] dont il a battu la longévité politique. Désigné par le néologisme « bibisme », raccourci de son prénom, cette « marque » constituera une nouvelle idéologie qui dominera l’échiquier politique israélien, mélange de nationalisme et de libéralisme, assorti d’une bonne dose de populisme et tenté par le messianisme.
Génie de la communication, Benyamin Netanyahou deviendra une icône politique, en Israël comme dans certains médias internationaux qui n’hésiteront pas à le présenter comme le « roi d’Israël ». Or le Netanyahou de 2023 a changé d’image. Dans ses interventions publiques, il apparaît fatigué et désemparé ; tout le contraire du portrait d’un homme charismatique, fort et sûr de lui, qu’il s’était construit au fil des années. En présentant son projet de réforme judiciaire, le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël a réussi à déplacer le débat public ; l’opposition droite-gauche, qui était devenue progressivement un débat « pour ou contre Netanyahou », a subi une nouvelle métamorphose. Dorénavant, c’est la controverse « pour ou contre la démocratie » qui domine les manifestations et pour laquelle Netanyahou ne s’était pas préparé.
Dès son entrée dans la politique israélienne en novembre 1988 comme député à la Knesset [le Parlement de l’Etat hébreu], Benyamin Netanyahou a pris soin de se forger une marque et de l’embellir d’année en année, notamment à partir de 1996 lorsqu’il deviendra, pour la première fois, Premier ministre d’Israël. Issu d’une famille militante de droite et américain de culture, Netanyahou inaugurera un mode de gouvernance encore inconnu en Israël : grâce à sa maîtrise parfaite des médias et à ses talents d’orateur, il saura haranguer les foules pour les rallier au « bibisme », vantant son action politique comme son savoir-faire en matière économique et diplomatique.
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