Une Cléopâtre noire sur Netflix, est-ce réécrire l’histoire ?

Dans une pétition lancée en Égypte et déjà signée par plus de 18 000 personnes, la réalisatrice est accusée de « blackwashing », c’est-à-dire d’avoir délibérément transformé en femme noire une figure historique supposément blanche. Le « blackwashing » et le « whitewashing » – bien plus fréquent – consistent respectivement à employer des acteurs noirs pour incarner des personnages blancs, ou supposés tels, et des acteurs blancs pour incarner des personnages qui ne le sont pas, dans une fresque historique ou l’adaptation d’une œuvre.

Dans la fiction américaine comme dans les œuvres d’art, voilà longtemps que Cléopâtre fait figure d’icône pour la communauté afro-américaine. Mais si le bât blesse avec ce nouveau film, c’est qu’il s’agit d’un documentaire : sa visée éducative exige nuances et précision.

La civilisation de l’Egypte ancienne pose un problème idéologique dans l’Amérique ségrégationniste : l’histoire de l’humanité avait connu une grande civilisation qui n’était ni blanche, ni européenne, à la différence des cultures grecque et romaine. Comme l’exprimait dès 1854 Frederick Douglas, militant pour l’abolition de l’esclavage : « Le fait que l’Égypte ait été une des premières demeures du savoir et de la civilisation est fermement établi. […] Mais l’Égypte est en Afrique ».

C’est ainsi que Cléopâtre est progressivement hissée au statut de symbole de la lutte contre l’esclavage .

Mais c’est surtout dans la seconde moitié du XXe siècle que Cléopâtre devient une icône noire. Le contexte dans lequel éclot ce regain d’intérêt pour la reine, et plus généralement l’égyptomanie américaine, est tout à fait particulier : le nouvel avatar de Cléopâtre s’inscrit dans le cadre de la revendication des droits civiques des Noirs.

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