Le nouveau régime médiatique 

En une vingtaine d’années, les démocraties occidentales ont changé de régime médiatique. Un changement brutal et spectaculaire qui a transformé le débat politique, et déséquilibré l’expression des opinions dans l’espace public, en favorisant l’extrémisme et la polarisation.

Les démocraties sont de plus en plus fragilisées par des conflits qui portent sur leur essence-même  : la mise en cause des résultats des élections, le rejet de l’objectivité de l’information, la transformation de l’adversaire en ennemi, la banalisation de la violence politique. L’essence de la démocratie, c’est-à-dire ce processus où la liberté d’expression est orientée vers la délibération, où les volontés des citoyens dialoguent et forment une décision acceptée par la minorité comme par la majorité, semble ébranlée et contestée. Le dispositif médiatique qui permettait la confrontation des idées, des propositions, des candidats, de façon fiable, en reflétant et respectant la pluralité des opinions, est à l’agonie. Cette fonction démocratique des médias a été brisée par l’émergence du nouveau régime médiatique.

Comme l’avait écrit, dans un article célèbre l’historien Melvin Kranzberg, « la technologie n’est ni bonne ni mauvaise, elle n’est pas neutre non plus ». En tant que tels, les médias sociaux ne sont ni bons ni mauvais. Il en existe d’ailleurs une grande variété, de l’utopique et décentralisé Mastodon au sulfureux Parler, en passant par les grands réseaux commerciaux comme Facebook et Twitter, mais aussi Instagram, Snapchat, TikTok et peut-être bientôt Pokemon Go et d’autres applications en cours d’évolution vers un modèle « social ». Ils ne sont ni bons ni mauvais, mais ils construisent un espace conversationnel qui n’est pas neutre.

Le premier régime médiatique a vu le jour dès le début du XIXème siècle avec la naissance de la presse populaire sur la côte Est des États-Unis. Cette presse populaire permet l’émergence du journalisme moderne, qui devient progressivement une profession, la notion d’information commence à se construire – mais il faudra un siècle pour qu’elle s’impose, et avec elle, le concept d’objectivité – et surtout la presse populaire s’adresse à tous.

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