Des sacs remplis de plus de 1 million d’euros en espèces, une vice-présidente du Parlement européen et un ancien eurodéputé incarcérés pour tentative d’une « organisation criminelle présumée » d’influer sur les politiques de l’Union européenne (UE) au profit du Qatar. Ce scénario de mauvais film constitue le plus retentissant scandale ayant jamais éclaboussé une institution censée incarner l’exemplarité européenne en matière de moralité politique et de transparence.
L’interpellation, vendredi 9 décembre à Bruxelles, de la socialiste grecque Eva Kaili, qui est l’une des quatorze vice-présidents du Parlement européen, de Francesco Giorgi, un assistant parlementaire, de Pier Antonio Panzeri, ancien eurodéputé social-démocrate italien, et de trois autres personnes, donne une image désastreuse de l’assemblée parlementaire des Vingt-Sept. Cela au pire moment : alors que les démocraties européennes font face à une agression russe qui vise aussi leur modèle, alors que l’UE est confrontée à la montée des pratiques autoritaires parmi ses membres, et alors que le monde est secoué par la résurgence de rivalités géopolitiques où l’Europe peine à peser.
Ce « Qatargate » jette une lumière crue sur la légèreté des règles du Parlement européen en matière d’éthique, de lutte anticorruption, de gestion des conflits d’intérêts et du lobbying. Que des eurodéputés puissent cumuler leur mandat avec les fonctions d’avocat ou de consultant est incompréhensible. Qu’un député – voire un commissaire européen – puisse, après avoir quitté ses fonctions, se faire embaucher dans le secteur sur lequel il a travaillé, est inacceptable. Qu’aucune règle n’oblige les élus européens à déclarer leurs rencontres avec des représentants d’Etats étrangers est choquant.
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