«Black Mirror» avait mieux compris l’importance du discrédit politique que les pros du secteur

Connaissez-vous Waldo? C’est un ours bleu en colère, agressif et grossier, amateur de blagues salaces. Une sorte de Hanouna version cartoon. Waldo n’est pas réel. C’est un personnage d’animation qui connaît, à force d’outrances et de vulgarités, un certain succès à la télévision.

Les expressions de son visage, ses gestes et ses jurons sont interprétés en coulisses par un acteur raté (et désespéré), qui pilote l’ours comme un bolide carburant à la rage. Les traits de son visage, à peine esquissés, ignorent la joie ou la honte, la tristesse ou la peur. Waldo ne connaît que la colère. Il lui doit son succès. Il l’attise et la comble en même temps. Il la flatte et l’excite.

À l’occasion d’une élection partielle, Waldo (enfin, ceux qui le manipulent en coulisses) décide de se porter candidat. Une formidable occasion de booster son audience, mais pas seulement. Waldo a une mission civilisatrice, pour parler comme Bolloré: jeter le discrédit sur les «politiciens». Comment voter pour une image animée? s’offusquent les professionnels de la politique. Un candidat qui n’est pas réel? Ce à quoi Waldo a beau jeu de rétorquer: «Vous semblez moins humains que moi.»

(…) Pourtant, lorsqu’il est apparu dans la série Black Mirror en 2013, l’ours n’a pas fait recette. L’épisode 3 de la saison 2 intitulé «The Waldo moment» («Le show de Waldo», en français) n’a pas conquis les fans et le concepteur de la série, Charlie Brooker, pensait lui-même avoir raté l’épisode. La raison en est simple. Trois ans avant la victoire du Brexit, la tyrannie des bouffons qui allait s’imposer aux démocraties occidentales était impensable. Il a fallu attendre la nuit du 8 novembre 2016 pour que cela devienne réalité.

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