À sept mois des prochaines élections, l’attentat de l’avenue Istiqlal du 13 novembre, qui a fait six morts et quatre-vingt-un blessés à ce jour, ranime le spectre des années 2015-2016.
À l’époque, confrontée aussi à des enjeux électoraux cruciaux, la Turquie avait connu une longue séquence de terreur, un engrenage d’attentats, d’attaques et de massacres, un assassinat politique et une tentative de coup d’État. Depuis dimanche, alors que le ministre turc de l’Intérieur accuse les nationalistes kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, inscrit sur la liste des organisations terroristes de l’UE et des États-Unis) d’être les auteurs de l’attentat d’Istiqlal, la crainte est grande que l’histoire se répète.
Rappel des faits: alors que les élections de juin 2015 se profilent, le gain électoral sur lequel Recep Tayyip Erdoğan table grâce aux négociations qu’il a lancées avec les Kurdes depuis 2009 n’est plus si évident. À l’intérieur, le Parti démocratique des peuples (HDP), une coalition dont le noyau dur est constitué par les nationalistes kurdes –dont certains mais pas tous sont alignés sur le PKK– rencontre un fort soutien de la part de la gauche et même de certains libéraux (au sens anglo-saxon du terme). Ces derniers s’opposent également à la nouvelle constitution présidentialiste et autocratique souhaitée par Erdoğan. Dès lors, le HDP pourrait bien dépasser la barre fatidique des 10% (au niveau national) et se trouver représenté au sein du Parlement.
Résultat: dès mars 2015, lors d’un dernier round de négociation au palais de Dolmabahçe, Erdoğan fait la sourde oreille aux propositions concrètes avancées par la partie kurde. Il stoppe les négociations avec leur leader emprisonné depuis 1999, Abdullah Öcalan, et ferme les yeux lorsque les permanences du HDP sont attaquées par les ultra-nationalistes turcs. Il faut dire aussi que le paysage –et les rapports de force– ont profondément changé depuis 2009, en particulier à cause de la guerre en Syrie.
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