« Trop tard pour la fin du monde, assez tôt pour le recommencer »

Imaginons une application dont la fonction serait de donner, en temps réel, les dernières nouvelles de la fin du monde. Appelons la BeReady. Utilisant les données fournies par les experts du Giec relatives aux taux de CO2 dans l’atmosphère, elle proposerait une estimation de l’année où les corps humains commenceront à bouillir de l’intérieur.

Elle saurait calculer, avec une assez grande précision, la position des sous-marins russes et états-uniens, ainsi que le degré d’ouverture des écoutilles par lesquelles pourraient passer des ogives nucléaires. Sa veille technologique évaluerait la possibilité que la Singularité, cette Intelligence Artificielle supposée émerger grâce au développement exponentiel des capacités de computation des ordinateurs reliés par Internet, prenne le pouvoir sur Terre plus tôt que prévu. Ajoutons à cela un flux d’info en continu sur des astéroïdes en vadrouille, des tempêtes solaires susceptibles de détruire les satellites, de probables pandémies, et voilà justifié le slogan : « BeReady vous accompagne jusqu’à l’apocalypse ».

C’est en effet un air de fin du monde que l’on respire, près des méga-incendies ou dans l’acidité des océans. Que la guerre en Ukraine ait une trame mondiale ajoute une teinte radioactive à l’atmosphère de nos anticipations : à l’éco-anxiété s’ajoute la nucléo-anxiété, toutes deux minant de l’intérieur l’anxiété économique des salaires sacrifiés sur l’autel des super-riches et leurs tranquillisants de première classe. Fin de mois difficile et fin du monde fossile : ça sent la fin. Même les scientifiques – à Berkeley, Stanford, Cambridge – créent des Centres de recherche sur les « risques existentiels », les « menaces d’extinction » engendrées par les technologies futures que méditent des ingénieurs.

La suite ici : « Trop tard pour la fin du monde, assez tôt pour le recommencer », par Frédéric Neyrat