Le sens de l’information

Depuis la création de la presse, les éditorialistes sont chargés de résoudre ces angoissantes questions. Pendant longtemps, ils se sont appliqués à plaquer sur l’actualité une grille idéologique, progressiste, réactionnaire, royaliste, marxiste, etc. Les journaux du XIXème siècle comme ceux de la plus grande partie du XXème fonctionnaient ainsi, observant l’histoire en train de se faire à travers le prisme déformant des préjugés politiques. C’était bien commode : le public ravi, déjà acquis aux idées de « son journal » trouvait dans les éditos de quoi se conforter dans sa façon de voir le monde. Les cogniticiens nomment cela le « biais de confirmation ». Les idées tournaient ainsi dans une boucle bien fermée.

De quel « sens » parle-t-on aujourd’hui ? Le citoyen submergé d’informations souhaite avant tout les comprendre. Relisons ce qu’écrivait Edgar Morin en 1997 : « Il faudrait aussi savoir méditer et réfléchir afin de ne pas subir cette pluie d’informations nous tombant sur la tête, chassée elle-même par la pluie du lendemain et ainsi sans trêve, ce qui ne nous permet pas de méditer sur l’événement présenté au jour le jour, ne nous permet pas de contextualiser et de le situer. Réfléchir, c’est essayer, une fois que l’on a pu contextualiser, de comprendre, de voir quel peut être le sens, quelles peuvent être les perspectives. Encore une fois, pour moi, la ligne de force d’une sagesse moderne serait la compréhension. » (Amour, poésie, sagesse, Edgar Morin, Seuil 1997).

Or, plutôt que d’essayer d’apporter cette compréhension, les médias sociaux nous submergent de commentaires et d’opinion. Par voie de conséquence, les éditorialistes traditionnels font face au risque de la banalisation. La fin des idéologies (de certaines d’entre elles du moins), la complexification du monde et sa globalisation, rendent périlleux l’art de « l’édito » au jour le jour.

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