« En matière économique, les cryptos sont un mélange entre l’astrologie et l’homéopathie »

Avec l’essai auto-édité Popping the Crypto Bubble (Janvier 2022, non traduit), le trio d’auteurs composé de Jan Akalin, Stephen Diehl et Darren Tseng entend montrer que l’engouement autour des cryptos est aussi irrationnel et dangereux. Pour ces trois ingénieurs et entrepreneurs résolument cryptosceptiques, il est urgent de faire retomber cette bulle, l’une des plus prédatrices de l’histoire économique. Entretien:

Les cryptos ne feront pas nécessairement partie de notre futur car ce secteur est bâti sur des promesses technologiques et économiques décevantes, il a donc toutes les chances de s’effondrer. Au cœur de la rhétorique pro-crypto, on trouve l’idée que cette nouvelle classe d’actifs permettrait de réinventer la monnaie indépendamment des structures de pouvoir en s’appuyant sur une base de données décentralisée, transparente et sécurisée : la blockchain. En tant qu’ingénieurs et entrepreneurs spécialistes des FinTechs, nous considérons au contraire que cette technologie est pauvre et qu’elle n’offre pas d’avantages pour les consommateurs finaux. Déjà parce que les cryptos ne fonctionnent pas comme des monnaies. Aujourd’hui, Bitcoin ne fait pas mieux que les technologies de paiement existantes (Visa, Mastercard, ApplePay ouGooglePay) parce que l’architecture du réseau ne supporte pas un nombre important de transactions par seconde. L’ajout de nouvelles couches comme le protocole Lightning Network résout le problème du passage à l’échelle mais introduit de nouvelles rigidités qui rendent difficiles la généralisation du Bitcoin comme monnaie.

Le principe du « lose your key, lose your money » (si tu perds la clé de ton portefeuille numérique, tu perds l’accès à tes fonds, ndlr) est également un défaut de conception technique majeur. Enfin, le fait que l’on puisse à tout moment accéder à l’historique des transactions sur la blockchain pose de sérieux problèmes de sécurité, pour les individus comme pour les entreprises. Les cryptos sont avant tout des actifs financiers qui reposent sur une technologie opaque légitimant un système de spéculation basé sur les arnaques. L’économie des cryptos n’en est pas vraiment une puisqu’il n’y a pas de création de valeur. Ces actifs n’ont pas de valeur économique intrinsèque, ils ne sont pas adossés à une production, à des revenus, des flux de trésorerie ou à des immobilisations comme des usines. Un Bitcoin n’a de valeur que si je peux le revendre à une personne tierce pour plus d’argent que le prix que j’ai effectivement payé. C’est un actif par essence spéculatif. C’est pour entretenir cette mécanique que l’industrie a constamment besoin d’enrôler de nouvelles personnes.

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