L’ampleur du mouvement peut être expliquée en partie par le ras-le-bol général de toute la population à tous les niveaux par rapport à la situation actuelle en Iran. Certains souffrent de la situation économique, la majorité, les classes populaires, les classes moyennes qui disparaissent, dévastées par les sanctions et la corruption, et les classes dirigeantes, les anciennes surtout, qui aspirent à la liberté. C’est l’étouffement politique : un ras-le-bol politique et économique auquel il faut ajouter la chape de plomb culturelle et morale qui s’est mise en place depuis 1979. Entre autres, toutes les interdictions pour les jeunes : pas de sorties, pas de fréquentation, la ségrégation au travail, le voile pour les femmes.
La mort de Mahsa Amini n’est pas exceptionnelle en Iran, régulièrement des femmes sont arrêtées, violentées, mais dans ce cas, c’était inattendu et cela a eu d’autant plus de conséquence qu’elle était kurde, ce qui les a soulevés car les Kurdes comptent parmi les populations iraniennes les plus discriminées.
Comment expliquer la dureté de la répression ?
C’est un schéma qui revient à chaque manifestation : toutes les grandes manifestations sont réprimées de la même manière. Peut-être que la sensibilité occidentale n’était pas aussi grande avant. L’armée, les groupes paramilitaires sont tout de suite envoyés dans les rues. Et cette fois-ci plus que d’autres, car le régime est acculé.
Cette fois, il y a les raisons économiques, politiques et morales, mais en plus les manifestants réclament la tête du régime. Quand on scande « Mort au dictateur« , il s’agit de Khamenei. Jusqu’à présent personne n’avait été si loin. On réclame un changement de régime et donc le régime n’a pas le choix. Pour survivre, c’est la répression. Et il utilise une force sans retenue, sans aucun état d’âme. D’autant qu’il considère que les manifestations sont manipulées par l’extérieur. A mon avis, il n’y aura pas de sanction pour la police des mœurs, tout au plus une réformette.
La suite ici : Où peut mener la révolte en Iran 40 jours après la mort de Mahsa Amini ? Trois questions à Firouzeh Nahavandy