Mary Wanjiru se déplace en chaise roulante. Ce n’était pas le cas il y a un an encore, quand, pleine d’enthousiasme et d’optimisme, elle montait à Nairobi dans un avion pour Riyad. Cette mère de trois enfants avait trouvé un poste d’employée de maison en Arabie saoudite, et c’était pour elle la promesse d’un avenir meilleur, un moyen de sortir sa famille de la misère. “J’étais heureuse à l’idée de pouvoir subvenir aux besoins des miens”, confie-t-elle.
Mais très vite, les choses ont mal tourné. Deux mois durant, elle n’a pas reçu de salaire, et devant ses demandes d’explications ses employeurs l’ont punie en lui confisquant son téléphone et en limitant strictement ses échanges avec sa famille restée au Kenya. Ils lui ont également pris son passeport et interdit de chercher un autre poste.
Et un jour, son patron l’a poussée du balcon de l’appartement, au deuxième étage. “Je suis tombée sur le dos, je ne pouvais pas me relever ni bouger mes jambes.” Touchée à la colonne vertébrale, elle allait perdre l’usage de ses jambes. Après un mois d’hospitalisation sur place, Mary Wanjiru a été renvoyée au Kenya, sans rien.
La Kényane avait été embauchée dans le cadre de la kafala, système qui, en Arabie saoudite, permet aux particuliers et aux entreprises de “parrainer” un travailleur étranger pour qu’il vienne travailler dans le pays [Cette disposition du droit musulman, initialement prévue dans le cadre d’une adoption, a fini par désigner le parrainage préalable à toute embauche des travailleurs étrangers dans les pays du golfe Arabo-Persique.]
La kafala, qui équivaut de fait à une mise sous tutelle de l’employé par l’employeur, passe par une véritable traite d’employés domestiques, organisée au vu et au su de tous, sur les réseaux sociaux.
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