Depuis un demi-siècle, l’Iran s’est manifesté par des mouvements sociaux d’avant-garde. Cela a commencé par un mouvement d’écrivains d’extrême gauche lié au mécontentement populaire se terminant par une révolution au nom de l’islam en 1979. Il s’agit de la seule révolution au nom de l’islam qui ait réussi et dont les conséquences ont été ravageuses tant pour la société iranienne que pour ses rapports au monde.
Le second mouvement d’envergure a commencé en 2009 à l’occasion des élections présidentielles et contrairement au mouvement de 1979, il a inauguré le règne de la citoyenneté et de la démocratie dans le slogan « Où est mon vote ? » des jeunes. Celui-ci dénonçait la fraude électorale massive qui avait donné pour gagnant le président sortant Ahmadinejad au mépris de Moussavi, le candidat réformateur. Ce mouvement avant-coureur qui a éclaté un an et demi avant les révolutions arabes de fin 2010-2012 inaugurait ainsi l’aspiration démocratique des fragiles sociétés civiles moyen-orientales aux prises avec des gouvernements autocratiques, mouvements souvent dépourvus d’organisation et de personnel politique face à un Etat dominé par des groupes répressifs, ennemis mortels du pluralisme politique.
Le troisième mouvement où l’Iran a fait figure d’avant-garde est celui qui se déroule sous nos yeux depuis trois semaines et où les femmes ont constitué la figure de proue. Certes, au Moyen-Orient et plus généralement dans le monde musulman, les femmes ont souvent dénoncé le despotisme patriarcal mais elles ont été souvent minoritaires (des intellectuelles ou des femmes des couches dites « occidentalisées ») et leur voix ne portait pas très loin, ne serait-ce que parce qu’une grande partie des hommes, au nom des sacro-saintes valeurs familiales s’y opposaient ou refusaient de s’y engager. Désormais, ces deux verrous ont sauté. En Iran on assiste à un mouvement dont les principaux acteurs sociaux sont des actrices sociales et en second lieu, les hommes y contribuent massivement, dans la nouvelle jeunesse iranienne qui entend ainsi rompre le sortilège du pouvoir théocratique fondé sur la peur, la corruption et la répression.
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