Comment l’agrochimie détruit la biodiversité et manipule la science

Depuis trente ans, les insectes disparaissent à une vitesse sidérante. Le désastre en cours a été chiffré par une étude parue en octobre 2017 dans la revue PLoS One, montrant un déclin dans des aires protégées allemandes de 76 % des insectes volants en à peine 27 ans. Les chercheurs estiment que l’ordre de grandeur est le même dans le reste de l’Europe occidentale. Dans l’ensemble du monde, près de 40 % des espèces d’insectes sont en déclin et plus de 30 % sont menacées d’extinction, selon une autre étude parue en 2019 dans Biological Conservation. Pléthore d’études locales confirment cette tendance, observant ici une chute de 70 % des papillons de prairie en Hollande, suggérant là une diminution de 85 % des carabes en France, sans parler des cris d’alarme réguliers des apiculteurs sur l’effondrement des populations d’abeilles domestiques.

Cette catastrophe écologique est alarmante en soi, mais aussi pour l’ensemble des écosystèmes qui dépendent de ces insectes, comme l’illustre la disparition du tiers des oiseaux des campagnes françaises en à peine quinze ans. Elle est aussi inquiétante pour les activités humaines puisque les trois quarts des principales cultures vivrières, occupant plus d’un tiers des surfaces agricoles mondiales, dépendent de ces insectes pollinisateurs à l’agonie.

Elle est, enfin, révoltante. Car la cause majeure de cette disparition est connue, du moins des spécialistes. Il s’agit d’un type particulièrement ravageur d’insecticides, dits systémiques, qui inondent le marché et les champs depuis les années 1990, soit l’époque où a commencé l’effondrement des invertébrés. Mais les vendeurs de ces insecticides – les néonicotinoïdes et le fipronil – mèneraient depuis plus de vingt ans de gigantesques opérations de manipulation de l’opinion, des politiques et de la recherche pour continuer à vendre leurs produits, allumant des contre-feux, influençant, corrompant voire menaçant des chercheurs, infiltrant les agences de régulation, « jusqu’à réussir cet extraordinaire tour de force : nous faire oublier que les insecticides… tuent les insectes  », écrit Stéphane Foucart.

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