Rarement, en temps de paix, un premier ministre britannique est arrivé au pouvoir alors que son pays se trouve dans un tel chaos et affronte une telle série de menaces. Liz Truss, 47 ans, qui devait succéder officiellement, mardi 6 septembre, à Boris Johnson après avoir rencontré la reine Elizabeth, va diriger un Royaume-Uni en proie à une crise économique, sociale, énergétique et politique sans équivalent depuis plusieurs décennies.
Ni son mode d’élection – par les seuls 172 000 adhérents du Parti conservateur, plutôt des Anglais du Sud, âgés et fortunés –, ni les promesses qu’elle a scandées pour être désignée – moins d’impôts, moins d’Etat, moins d’Europe –, ne paraissent de bon augure pour sortir le pays du marasme et améliorer ses relations avec ses voisins, dont la France.
Avec ses dockers et conducteurs de train en colère, ses consommateurs en révolte contre des factures d’électricité et de gaz astronomiques – elles doivent presque doubler en octobre –, ses eaux usées déversées dans la Manche, le pays ne donne pas une image reluisante. Comme dans les années 1970, la comparaison avec ses voisins n’est pas à son avantage. Son taux de croissance est le plus faible du G7, et son inflation plus élevée que dans l’UE (10,1 % contre 8,9 %)
Dans ce contexte difficile, les solutions proposées par Mme Truss, aux antipodes de celles mises en œuvre sur le continent, paraissent paradoxales. Alors que les Britanniques demandent des remèdes concrets à la tornade du coût de la vie, à la dégradation des systèmes de santé et de transport publics, alors que 42 % d’entre eux risquent de ne pas pouvoir se chauffer correctement cet hiver, la nouvelle première ministre promet de baisser les recettes de l’Etat, et de déréguler. Sur son ton tranchant d’héritière revendiquée de Margaret Thatcher, elle a prévenu : elle ne sera pas là pour « distribuer des subventions » et ne considère pas l’économie à travers « le prisme de la redistribution » .
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