Le reflux est brutal. A une très forte majorité (près de 62 %), les Chiliens ont repoussé, le 4 septembre, un projet très ambitieux de réforme de la Constitution qui promettait de clore définitivement les années sombres de la dictature d’Augusto Pinochet. Enclenché en 2019 par un mouvement massif de protestation contre un « modèle chilien » néolibéral décomplexé à l’origine d’une fracture sociale devenue insupportable, le processus de réforme constitutionnelle avait pourtant été loué initialement pour son exemplarité.
Il avait été soutenu massivement par le peuple chilien, qui avait approuvé à près de 80 % son principe par référendum, en octobre 2020, avant de désigner une assemblée constituante élargie à bien d’autres forces sociales que celles représentées par les partis politiques traditionnels. Deux ans plus tard, la défaite du camp Apruebo, incarné par le jeune président, Gabriel Boric, élu triomphalement en décembre 2021 mais qui n’a pris ses fonctions qu’au mois de mars, est d’autant plus cinglante.
Il appartiendra aux défenseurs de ce projet de transformation profonde du Chili d’analyser les causes de leur échec dans un référendum sujet, hélas, comme pour celui qui a entraîné le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne, à la propagande du pire et à la désinformation. Le sentiment d’occasion perdue serait sans doute moins grand si les électeurs avaient voté moins pour donner leur sentiment sur le projet de réforme que pour exprimer un mécontentement conjoncturel lié à la crise migratoire alimentée par l’arrivée de Vénézuéliens quittant un pays à la dérive, à une inflation mondiale ou encore au sentiment d’insécurité.
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