Archivage: que racontent les «Uber Files» du fonctionnement de notre démocratie?

C’est un jour comme les autres dans un cabinet ministériel belge : la soixantaine de collaborateur·trices qui y travaille va produire et échanger un grand nombre de données et documents. Ces échanges se font tant entre collègues d’un même cabinet, qu’avec les autres cabinets mais aussi avec des interlocuteur·trices de la société civile, des administrations ou du monde des affaires. Il en faudra du temps pour que le ou la ministre mûrisse sa réflexion, tranche pour aboutir à un projet de loi/décret/ordonnance et engage par ses décisions la responsabilité du gouvernement devant le parlement. Pour atteindre cet objectif, les conseiller·es de cabinet vont écrire une longue série de notes préparatoires, comptes rendus d’inter-cabinets, briefings pour les chef·fes de cabinet et leur ministre, réponses aux interpellations et questions parlementaires, instructions à l’administration, communiqués de presse, réponses aux citoyens et à la société civile, études et analyses demandées à des bureaux de consultance sur un sujet précis, SMS et autres PV de réunions avec les acteurs de terrain concernés par les modifications législatives ou les décisions à prendre, etc.

Comment se matérialisent ces interactions ? Aujourd’hui, c’est évidemment la plupart du temps par voie électronique (courriels, visioconférences, échanges de dossiers numériques ou… SMS et messageries), à côté du traditionnel papier et des nombreuses réunions. La mise en œuvre du résultat des élections par nos élu·es se trouve ainsi consignée dans une multitude de documents stockés sur différents supports (disques durs, serveurs, messageries instantanées, clés USB, etc.). Au terme de la mandature, cela peut donc représenter plusieurs mètres linéaires de dossiers papiers et plusieurs terras de données électroniques.

Tout un chacun·e perçoit l’importance de conserver les traces de ces échanges et rédactions pour comprendre l’évolution d’un dossier qui aboutit finalement à une décision politique qui impactera le quotidien de chaque citoyen·ne ou des secteurs économiques et sociaux d’une région. L’action de chaque entité (fédérale ou fédérée) et de ses gouvernements doit pouvoir être analysée a posteriori dans sa globalité. Or, en Belgique, ni la loi fédérale de 1955 relative aux archives publiques, ni les dispositions législatives et réglementaires régionales et communautaires en la matière, ne prévoient d’obligation pour les cabinets ministériels de conserver l’intégralité de ces documents. Pas plus qu’elles ne leur imposent de les verser dans un service d’archives public ou un centre d’archives privées agréé.

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