Dans un récent article de la New York Review of Books, Sue Halpern rappelle le contexte historique de la bataille contre le droit à l’avortement. Elle souligne que Roe v. Wade n’a pas suscité de polémique au départ, y compris dans le camp républicain. Ronald Reagan, quand il était gouverneur de Californie, avait signé en 1967 une loi très libérale sur ce sujet.
Ce n’est qu’à partir de 1975 que les dirigeants évangélistes qui souhaitaient bénéficier du soutien de la droite républicaine en firent leur principal argument de combat contre le supposé laxisme moral des Démocrates. Il semble qu’ils adoptèrent cette position pour des raisons tactiques. Il était désormais impossible de mobiliser leurs électeurs sur des thèmes racistes, favorables à l’exclusion des afro-américains. Ils remplacèrent ces sujets devenus embarrassants en raison de l’évolution des mentalités et de la loi par la bataille contre le droit à l’avortement qui avait l’avantage de souder de manière définitive au parti républicain le puissant mouvement évangélique du Sud. Dans ces conditions, à partir de 1980, la condamnation de l’arrêt Roe v. Wade devint un élément important des campagnes électorales républicaines et contribua, dès cette époque, à l’élection de Ronald Reagan.
Cette mobilisation religieuse fut confortée par l’appui de l’Eglise catholique qui, après avoir longtemps affronté l’hostilité des mouvements évangéliques, fit un front commun avec eux sur ce sujet. L’épiscopat multiplia les déclarations contre la légalisation et alla même jusqu’à menacer d’excommunication les parlementaires catholiques qui se prononçaient en faveur du droit à l’avortement. Il convient de rappeler à ce propos que six membres sur membres de la Cour Suprême sont aujourd’hui de confession catholique.
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