Et si on donnait du pouvoir aux citoyens ?

A la longue, cette situation devient absurde. A-t-on vraiment besoin de tels dispositifs pour recueillir de simples avis, sachant que ces derniers découlent pour une bonne part d’éclairages apportés par des experts déjà bien connus des responsables politiques ? Si l’on juge qu’une parole citoyenne, dument informée et construite, présente de l’intérêt, pourquoi en limiter l’impact ? Pour répondre à cette question, on ne peut pas se contenter du dicton canadien selon lequel aucune dinde ne propose d’avancer le repas de Noël. Par-delà la réticence des élus à renoncer à leur pouvoir, il faut examiner les arguments de fond, qui sont au nombre de trois.

Le premier est celui de la compétence, qui est forcément supérieure dans le chef d’élus rompus à la gestion des affaires publiques et qui peuvent puiser de l’expertise à de nombreuses sources (cabinets ministériels, bureaux d’études, auditions…). Mais on ne demande pas à des assemblées citoyennes de détailler des mesures concrètes, ni de piloter leur mise en œuvre. On attend d’elles des choix politiques, des décisions de principe, des orientations : dépénaliser ou non l’euthanasie, passer d’un mode de scrutin à un autre, sélectionner des incitants pour lutter contre le réchauffement climatique…

Les citoyens n’ont donc pas besoin de se muer en techniciens. En outre, dans toutes les expériences sérieuses, leurs choix sont éclairés par de nombreuses auditions d’experts et de représentants associatifs, et ils découlent d’une délibération au cours de laquelle les arguments s’affrontent et les positions s’affinent. Les élus n’ont pas le monopole de la rationalité, et les assemblées citoyennes présentent l’avantage de pouvoir se fonder sur l’expérience de vie de tout un chacun et sur les savoirs d’usage, sur une connaissance personnelle des impacts de la politique publique mise en débat.

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