La situation est très simple. Les sanctions sont sans précédent, elles ont été mises en place très rapidement et elles étaient inattendues. Même le gouvernement russe dit qu’il ne s’attendait pas à des sanctions contre la Banque centrale russe. La question est maintenant de savoir si ces sanctions sont suffisantes.
Elles ont déjà endommagé l’économie russe au-delà de toute attente, mais la question est de savoir si elles seront capables de changer le comportement de Vladimir Poutine en Ukraine. Pour l’instant, ce n’est pas le cas, la guerre continue. La situation sur le terrain est bloquée, non pas à cause des sanctions économiques mais grâce à la courageuse résistance du peuple ukrainien et des livraisons d’armes.
Cependant, deux facteurs cruciaux peuvent influencer la prise de décision de Poutine : le premier est l’embargo européen sur le pétrole et le gaz, l’autre est la Chine. En effet, si l’Europe introduit un embargo sur le pétrole et le gaz, Poutine n’aura rapidement plus de ressources budgétaires. Pour le dire simplement : les sanctions sur la Banque centrale de Russie lui ont enlevé ses stocks de liquidités, mais il continue à recevoir des flux d’argent. Les prix du pétrole sont très élevés et, ne serait-ce que de la part de l’Europe, il reçoit un demi-milliard d’euros par jour pour la vente de pétrole et de gaz.
La situation n’est pas aussi facile que cela pour lui parce que beaucoup de compagnies privées n’achètent plus son pétrole et son gaz – les entreprises américaines ne le font pas, Shell, BP, Total et certaines entreprises allemandes non plus et des entreprises de transports ont cessé d’acheminer du pétrole russe. La Russie ne vend en fait pas autant de pétrole et de gaz qu’elle espérait. Certains observateurs disent que la moitié du pétrole et du gaz russe n’est pas vendue, et que la moitié qui est vendue ne l’est qu’avec un énorme rabais – de 30 ou 35 dollars par baril.
Pourtant, même avec ce rabais, si la Russie parvient à rétablir le volume total de ses exportations, par exemple, en exportant en Chine ou en Inde au lieu d’exporter aux Etats-Unis, alors elle restera dans une bonne situation budgétaire. Si un embargo sur les hydrocarbures est mis en place par l’Europe, et si cet embargo est rejoint par d’autres pays comme la Chine, alors Poutine sera vraiment en difficulté parce qu’il n’aura pas d’argent pour payer ses soldats et pour payer les policiers qui répriment les gens dans la rue.
Ce sont donc les principales questions qui se posent maintenant concernant les sanctions. Les sanctions ont déjà eu un impact catastrophique sur l’économie russe, mais cet impact se fera sentir dans les années à venir. Ce n’est pas encore un impact qui prive Poutine de la capacité de payer la guerre au jour le jour. C’est ce qui est sur la table en ce moment.