Réfugiés ukrainiens, réfugiés syriens : sommes-nous universalistes ?

Au niveau de la population, les propositions d’accueil dans les familles et les initiatives de solidarité sont beaucoup plus nombreuses. Sur les réseaux sociaux, les messages assimilant l’arrivée de réfugiés syriens à une invasion n’ont pas d’équivalent pour les Ukrainiens. Dans les médias, les réfugiés ukrainiens bénéficient de plus de bienveillance, avec par exemple, la création d’une radio spécifique par la RTBF. Enfin au niveau des autorités publiques, l’accueil des réfugiés ukrainiens bénéficie de plus d’attention et de considération que celui des Syriens et ce depuis le sommet de l’État jusqu’à la plus petite commune.

Alors, une grande partie sans doute de l’explication à ce traitement différencié provient de notre proximité physique et culturelle avec l’Ukraine. Ensuite, nous nous sentons plus concernés, plus touchés par cette guerre que la guerre en Syrie. Une autre partie de l’explication provient de ce que le discours sur le grand remplacement a fortement percolé dans la société et qu’une partie significative de la population considère les réfugiés issus de pays musulmans comme une menace.

Est-ce que cette différence de perception dans la population peut justifier une différence de politique ? Sur le plan du droit des réfugiés, la réponse est non. La convention de Genève, le droit des réfugiés en Europe et en Belgique sont nourris de la même sève universaliste. Ce sont des droits reconnus à des individus et des obligations imposées aux États. Sur le plan du droit, il n’y a donc aucune justification à un traitement différencié.

Mais l’universalisme des droits en matière d’accueil des réfugiés pose depuis longtemps un problème de taille au politique que Michel Rocard avait résumé dans cette fameuse phrase : « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde mais on doit prendre notre part ». Mais si on considère avec sérieux cette objection réaliste, elle n’explique pas pourquoi on a été beaucoup plus réaliste avec les Syriens qu’avec les Ukrainiens.