La guerre, pourquoi pas, mais laquelle ? 

Question qui fâche, mais plus que légitime, nécessaire. Oui, Zelenski est un héros. Oui, les selfies, pourquoi pas ? Mais c’est un héros dont les médias européens ne devraient reprendre le discours qu’avec précaution. De fait, reprendre sans en rappeler les conséquences l’exhortation permanente de Zelenski au verrouillage de l’air au-dessus de l’Ukraine, c’est pousser l’opinion vers la guerre nucléaire. Encore une fois, pourquoi pas ? On a le droit, comme Zelenski, d’estimer que nous sommes déjà en guerre. Encore, idéalement, les peuples devraient-ils y marcher les yeux ouverts, et non pas en somnambules, comme en 14.

La presse parfois pousse à la guerre, et parfois au contraire en dissuade. Dans les années qui précèdent 1914, elle pousse à la guerre nationaliste de revanche, (notamment parce qu’elle est abreuvée de fonds secrets tsaristes). En 38-39, la confluence de la lâcheté munichoise de la presse grand public, et du pacifisme pro-nazi d’extrême-droite, pousse inversement aux accommodements illusoires. Dans les deux cas, il est permis de juger rétrospectivement qu’elle avait tort (même s’il faut se méfier des vérités rétrospectives

En 38-39, rares sont les voix qui tranchent avec le pacifisme béat ambiant. Parmi elles, celle d’un oublié, le député-journaliste (de droite) Henri de Kerillis, que j’ai découvert en écrivant La guerre avant la guerre. À partir de Munich (octobre 38), à la Une de l’Époque, son journal, il pousse chaque jour à l’armement à outrance. « Il faut en imposer à l’ennemi par l’audace des mesures de salut public. Vous entendez, Monsieur Daladier ? Évacuez ou préparez l’évacuation de Paris et des grandes villes ! Dispersez vos usines de guerre loin à l’intérieur du pays. Commandez du matériel à l’Amérique. Faites travailler les chômeurs aux fortifications. »

Si l’on prend le parti, aujourd’hui, de tenter d’éviter la troisième guerre mondiale, la seule évidence, concernant l’Europe de l’Ouest, c’est qu’il faut se préparer à une terrible guerre énergétique, c’est à dire à se passer durablement du gaz russe (pour lequel nous payons chaque jour au fournisseur 400 millions de dollars). Cela suppose une panoplie complète de mesures (recours aux fournisseurs alternatifs d’énergie, au gaz liquéfié, rénovation des logements, etc.), que liste cette minutieuse enquête deL’Obs. D’un mal pouvant jaillir un bien, dans ces mesures, figure la production massive d’énergies renouvelables.

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