Poutine n’est pas puissant. C’est nous, Européens, qui sommes impuissants 

Le 24 février, l’Europe a été réveillée par une attaque générale de l’armée russevisant à occuper l’Ukraine et détruire son gouvernement. Non content de cela, le président Poutine a annoncé son intention de reprendre le contrôle des anciennes possessions de l’Union soviétique, ordonné aux pays européens de ne pas intervenir sous peine de représailles radicales, et rappelé son contrôle de l’arme nucléaire.

Nous vivons en réalité un 1989 en sens inverse et en accéléré. Une nouvelle guerre froide, qui peut aisément tourner à la guerre chaude. Sauf une paix rapide sans annexion, notre société va changer fortement sur le plan politique, économique et militaire. L’Union européenne va devoir réarmer. Elle va devoir réorganiser son système énergétique pour réduire sa dépendance aux fournitures russes. Elle risque d’être confrontée à une énorme marée de réfugiés. Et elle va devoir financer tout cela au-dessus du lourd endettement déjà imposé par une pandémie de deux ans.

Pourra-t-elle le faire ? Certes, depuis l’attaque, les pays européens ont montré une réactivité impressionnante, et il faut s’en féliciter. En même temps, il faut en mesurer les limites. Pour obtenir un début de décisions sérieuses en défense, ils ont eu besoin de l’agression militaire la plus menaçante depuis 1945. Ce n’est pas du tout un signe de dynamisme. Comme pour la crise financière, pour les réfugiés, ou pour le coronavirus, l’action et la solidarité ne surviennent que tardivement, suite à des séismes. En réalité, les dysfonctionnements de l’Union européenne marquent le passé comme le présent de cette crise, et ils menacent aussi l’avenir.

L’inertie européenne récurrente a contribué à la guerre, à plusieurs égards. En premier lieu, l’Union européenne s’est élargie de façon incohérente en 2004 et 2007. Dès ce moment, on pouvait prédire que l’acquisition d’une frontière commune avec la Russie et les pays ex-soviétiques produirait tôt ou tard des menaces. Pourtant, depuis lors, malgré des promesses répétées dans multiples traités, rien de sérieux n’a été fait pour établir une politique étrangère et militaire digne de ce nom. Cela a contribué au sentiment d’impunité de Poutine.

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