« L’argent liquide disparaîtra un jour, mais pas tout de suite »

Technologiquement, on peut très bien envisager la disparition du liquide et la création de nouvelles infrastructures de paiement privées, du type diem, la monnaie que voulait lancer Facebook (ex-libra). Mais la monnaie est une construction sociale. Oui, l’argent liquide disparaîtra un jour mais cette disparition n’arrivera pas tout de suite et pas en même temps dans tous les pays.

D’ailleurs, malgré la baisse des paiements en liquide, la part des dollars en billets dans la masse monétaire gravite autour de 10 % depuis les années 1950, à un niveau stable. Pour l’euro, le nombre de billets en circulation a doublé depuis son lancement en 2002 et s’élève aussi à 10 % de la masse monétaire. Cela s’explique notamment par le fait que les dollars et les euros en billets sont utilisés dans beaucoup de pays en développement dont ce n’est pas la monnaie officielle. En revanche, les billets ne représentent plus que 1 % de la masse monétaire de la couronne suédoise, ce qui permet de donner un aperçu de l’avenir.

En Suède, l’utilisation de l’argent liquide est passée de 40 % des paiements en 2010 à moins de 10 % en 2020. Est-ce que cela pose des problèmes ?

Tout d’abord, cela ne pose pas que des problèmes. Dans son livre provocateur The Curse of Cash [« la malédiction de l’argent liquide », Princeton University Press, 2016, non traduit], l’économiste américain Kenneth Rogoff fait un plaidoyer contre le cash qui, grâce à l’anonymat, favorise l’évasion fiscale et la criminalité. Mais il est vrai que la Suède sert de laboratoire. Les sondages montrent que la baisse de l’argent liquide y est perçue négativement par la majorité des personnes âgées, mais aussi par les gens qui habitent dans les zones rurales. D’ailleurs, les autorités ont réagi : une nouvelle loi oblige la Riksbank, la banque centrale de Suède, ainsi que les banques privées, à fournir une infrastructure pour permettre aux gens d’accéder à l’argent liquide.

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