La première impression d’ensemble est sans doute une certaine déception sur la politique étrangère, qui devait être une force de cette nouvelle administration démocrate : un président avec un demi-siècle d’expérience internationale, au Congrès pendant quatre décennies puis à la vice-présidence pendant 8 ans ; une équipe compétente, et qui avait fait son travail sur la crise de la politique étrangère américaine.
Sur le contenu, certaines grandes lignes se dégagent déjà de l’action internationale de l’administration Biden, des clarifications d’abord, manifestes à travers les continuités depuis 2 voire 3 administrations : sur la centralité de la Chine dans la politique étrangère, sur une politique commerciale plus protectionnisme et sur le désengagement confirmé du Moyen-Orient – tendances héritées de Trump, voire d’Obama.
La déception vient d’ailleurs, dans la mise en œuvre notamment (Afghanistan, AUKUS), dans une certaine passivité (Iran), et ce qu’elle traduit d’un réalisme pragmatique, parfois brutal, flagrant sur l’Afghanistan, mais que l’on retrouve aussi sur le Moyen-Orient où le désengagement est assumé sans état d’âmes, ou encore sur l’Amérique latine, où l’approche transactionnelle demeure.
Clarifications également dans les ruptures avec Trump, qu’il s’agisse du retour dans l’Accord de Paris sur le climat ou au sein de l’OMS, dans le rétablissement de l’aide à l’Autorité palestinienne ou encore dans le règlement des différends commerciaux avec l’UE. Mais ces éléments illustrent aussi ce qui est peut-être le principal problème de l’administration Biden : la polarisation partisane a gagné la politique étrangère américaine, dont certains positionnements s’inversent au gré des alternances politiques à Washington.
Cette polarisation ajoute des difficultés à la politique étrangère : elle contribue au décalage entre l’ambition affichée et la réalité des moyens, et porte davantage atteinte à la crédibilité américaine que le retrait chaotique de Kaboul. Surtout, elle multiplie les obstacles dans un domaine où le président a normalement davantage de marge de manœuvre face au Congrès.
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