L’ONG russe Memorial liquidée, la mémoire verrouillée

La boucle est bouclée. Née à la fin des années 1980, au sein de la société civile, à la faveur de l’ouverture tentée par le dernier numéro un soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, l’association russe de défense des droits de l’homme Memorial a été dissoute mardi 28 décembre à Moscou par une Cour suprême aux ordres du Kremlin et de Vladimir Poutine. Plus qu’un symbole, c’est un tournant dans l’histoire de la Russie post-soviétique.

L’itinéraire de Memorial, de l’espoir démocratique au bannissement, illustre l’évolution politique de la Russie de ces trois dernières décennies. Créée à l’origine pour faire la lumière sur la répression politique à travers l’histoire de l’URSS et promouvoir la réhabilitation de ses victimes, Memorial comptait parmi ses fondateurs un authentique démocrate, l’académicien et Prix Nobel de la paix Andreï Sakharov, mort en décembre 1989. Après la chute de l’Union soviétique en décembre 1991, Memorial est passée du statut d’organisation dissidente à celui d’association publiquement reconnue.

Pendant la décennie 1990, sous le règne de Boris Eltsine, les historiens de Memorial ont pu bénéficier de la collaboration d’instituts d’archives, de bibliothèques, d’universités. Ils se sont concentrés sur les crimes du stalinisme, ont exploré les lieux des plus grandes répressions, réuni objets et documents, mis à nu charniers et fosses communes. Au fil des années, ils ont dressé une liste – inachevée – de noms de trois millions de victimes du goulag.

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